Le projet de loi de modernisation de notre système de santé est en discussion au parlement (lire le rapport complet).
L’article 11ter nous intéresse tout particulièrement. Il prévoit que les activités impliquant la diffusion de sons à un niveau sonore élevé, dans tout lieu public ou recevant du public, clos ou ouvert, doivent être exercées de façon à protéger l’audition du public et la santé des riverains.
Et puis plus rien sur les riverains et tout spécialement sur les riverains exposés à des nuisances provenant de la voie publique.
Cette loi est un progrès*, en ce sens qu’elle saisit non seulement le niveau sonore dans les salles de spectacle, mais aussi le niveau de la diffusion sonore liée à des activités (ce qui est une notion large et dépasse les salles de spectacle ou bars).
Mais le fait que seule la « diffusion de sons » soit visée et que donc l’action législative se focalise en fait sur la protection auditive de ceux qui sont dans ces salles ou qui assistent à des spectacles organisés à l’extérieur, en laissant dans les limbes la protection des riverains est parfaitement décevant.
Oui, décidément les habitants des villes ont bien du mal à faire admettre l’existence des nuisances sonores générées, non par de la musique amplifiée, mais par les bruits de clientèle des bars qui stationne sur la voie publique ou encore, dans des sites parfois éloignés de tout établissement mais devenus des lieux de rassemblement pour se distraire en faisant beaucoup de bruit, au point de perturber gravement le sommeil de ceux qui habitent à proximité.
Le dispositif légal est notoirement insuffisant pour ces situations et nos association le dénoncent depuis maintenant plusieurs années. Les tapages sur la voie publique peuvent être réprimés via l’article R.1337-7 du code de la santé publique ou par l’article 623-2 du code pénal, qui englobent les bruits provenant des activités professionnelles. Mais le constat « à l’oreille » que doivent réaliser les agents de police chargés des verbalisations, sans seuils de référence, est un casse-tête. La modicité de la sanction pénale n’est pas du tout motivante non plus. Et donc ces textes ne sont que très rarement mis en œuvre par la police.
On apprécie que ce soit un amendement ministériel qui ait fait entrer la protection des riverains dans l’article 11 ter. Mais on aurait aimé que la loi en gestation se saisisse du problème des nuisances sonores sur l’espace public à bras le corps. On aurait aimé qu’elle prévoie des sanctions dissuasives pour les établissements qui accaparent l’espace public et qu’elle consacre, sous un jour pénal, leur obligation de veiller à ce que le comportement de leur clientèle ne perturbe pas la tranquillité publique.
Trop ambitieux quand on sait que l’article 11 ter fait déjà l’objet d’une réaction vive des lobbies des établissements (Lire un précédent article sur le sujet, §5 et 6) ? Non, certainement pas trop ambitieux, mais responsable quand on sait que :
– les enjeux du bruit sur la voie publique sur la santé du voisinage et ses effets à la fois économiques et sociaux
– que les habitants des quartiers débordés par les nuisances nocturnes réclament de leurs parlementaires et gouvernants une action, action qui serait majoritairement bien reçue : un sondage commandé par le ministère de l’Ecologie, réalisé par l’IFOP et publié en septembre 2014 révélait que 82% des Français sont « préoccupés » par les nuisances sonores.
* Nos commentaires laissent de côté la partie de la loi qui a trait directement à la consommation d’alcool.
Nos députés ne sont-ils pas assez alertés sur les nuisances sonores ? Ne sont-ils pas élus pour nous représenter ? Que faudrait-il faire pour qu’ils agissent ? Pourtant 82 % des Français, ça fait beaucoup de bulletins de vote.