L’Association Réseau Vivre Paris ! a lancé en 2021 deux procédures contre la Mairie de Paris, suite à la publication du nouveau règlement des étalages et terrasses (« RET 2021 »).

Notre procédure principale, pendante devant le tribunal administratif, vise à démontrer les carences fautives de la mairie de Paris et de la préfecture de police dans la gestion du RET. Le coût de cette procédure se monte pour l’instant à 6000€.

La deuxième procédure visait à démontrer que les imprécisions du RET 2021 portaient atteinte au droit des riverains, des piétons et des personnes à mobilité réduite. Le coût de cette procédure s’est monté à 4080€.

Si la date de jugement pour la procédure principale en carences fautives n’est pas connue, une décision a en revanche été rendue concernant les faiblesses du RET. 

Notre analyse de la décision du Tribunal Administratif N ° 2126512/4-1 rendue le 8 février 2024.
S’il déboute formellement le Réseau Vivre Paris de ses demandes, les attendus du TA apportent plusieurs améliorations significatives aux Parisiens, riverains, piétons, personnes à mobilité réduite, dont nous défendons les intérêts, tel David contre Goliath, contre le lobby bistrotier dont la Maire de Paris socialiste s’avère, contre toute attente, la représentante en chef.

Rappel sur les conséquences du RET 2021 (mis à jour en 2023)

Rappelons que, sur décision de la maire de Paris, sans aucun vote en Conseil de Paris, le RET 2021 a autoritairement pérennisé les terrasses éphémères qui avaient envahi l’espace public à la sortie du COVID. (voir notre article)

Il y a quelques jours, la Maire de Paris, puis son premier adjoint, réaffirmaient avec obstination que les bistrots constituent « l’âme de Paris » (eh oui, la mono activité bistrotière est même devenue la religion de l’exécutif parisien), le même jour qu’ils remettaient une médaille d’honneur de la Ville de Paris au propriétaire d’un restaurant … disposant d’une terrasse illicite notoire !!!

En chiffres, le RET 2021 se traduit par un accroissement de 40% entre 2019 et 2023 de la surface des terrasses autorisées (Source : Open Data), puisque l’on est passé de 142 765 m² de terrasses autorisées au 26 août 2019 et à 200 069 m2 au 22 septembre 2023 (dont 49 033 m2 de terrasses estivales).
Cet important accroissement a généré d’importantes nuisances au voisinage (tapages nocturnes, atteintes à l’esthétique, malpropreté et autres incivilités de toutes sortes, et cela surtout dans les arrondissements centraux, que l’exécutif parisien a choisi de traiter par le déni.

Pour rappel :

  • En juillet 2022, l’exécutif Parisien a refusé de prendre en considération les vœux des groupes « EELV » et de « Changer Paris », votés au conseil de Paris, pour un réajustement dudit RET.
  • De même, il s’est toujours refusé de rendre public, malgré son engagement, le bilan « des terrasses » de la saison estivale 2022.

Les attendus du jugement :

Le tribunal administratif apporte des précisions importantes tant sur la circulation des piétons en réitérant le caractère contraignant du PAVE (Plan de mise en accessibilité de la voirie et des espaces publics) lors de l’autorisation de terrasses, que sur les conditions d’octroi de terrasses dont la largeur est supérieure au tiers de la largeur utile du trottoir. 

Sur le caractère contraignant du PAVE et pour mémoire : 

  • Le Ministère de la transition écologique précise, sur son site, que « l’objectif de la mise en accessibilité de la voirie et des espaces publics est que toute personne handicapée ou à mobilité réduite puisse se déplacer et circuler en tout point de l’agglomération, accéder à tous les espaces de la ville, traverser ses axes de circulation, se reposer, etc. Et ce de façon autonome, au même titre qu’une personne valide.
  • Le présent jugement rappelle que le Plan d’Aménagement de la Voirie et des Espaces publics (PAVE) de Paris emporte des effets juridiques contraignants. C’est donc à cette aune qu’il faut analyser l’art. L 1214-11 du Code des transports : « Les décisions prises par les autorités chargées de la voirie et de la police de la circulation ayant des effets sur les déplacements dans la région Ile-de-France sont compatibles ou rendues compatibles avec le plan de mobilité.

Ce ne sont pas des considérations programmatiques ni de simples recommandations. Pour être compatible, le Règlement des Terrasses et Etalages (RET) de la Ville de Paris, doit répondre au principe de “continuité de la chaîne du déplacement” établi par la loi de 2005, en supprimant tout obstacle situé le long de la chaîne du déplacement.

En conséquence :

  • Les terrasses octroyées doivent impérativement laisser un espace minimum de 160 cm libre de tout obstacle, obstacle qui porterait atteinte à l’accessibilité au sens large et plus particulièrement des personnes handicapées. 
  • Pour l’octroi de toute terrasse dont la largeur est supérieure au 1/3 du trottoir, le PAVE, en son point R. 27 exige qu’il soit tenu compte des flux piétons constatés ou attendus sur le site

Sur l’octroi des terrasses d’une largeur supérieure au 1/3 du trottoir :

En règle générale, la largeur de terrasses ne doit pas dépasser 1/3 de la largeur utile du trottoir. Or on constate, la Mairie autorise régulièrement des autorisations de terrasses et contre-terrasses plus larges. 
Dans le RET 2021, cette possibilité est transcrite en des termes anormalement généraux: « lorsque la configuration des lieux et l’importance locale de la circulation piétonne le permettent« , ce qui est propice à des décisions arbitraires.
Selon le jugement, ce cas de figure nécessite un examen individuel de la situation, sous le contrôle du juge de l’excès de pouvoir (Tribunal Administratif). 
Cet examen doit valider que la terrasse octroyée est bien adaptée à son environnement urbain. A ce titre, il faut se référer à l’article DG 5 du RET 2021 qui énumère les situations pour lesquels un refus est possible. On soulignera que s’impose la prise en compte du flux des piétons, mais aussi le respect des espaces de plantations ….
En cas de largeur de terrasses disproportionnée, il nous semble opportun que les collectifs et associations adoptent une démarche pro-active via les mairies d’arrondissement ou la CADA afin de s’assurer que l’autorisation litigieuse a bien fait l’objet d’une analyse préalable approfondie.
Dans ce contexte, les collectifs peuvent déjà s’appuyer sur la cartographie de l’APUR (Atelier Parisien d’Urbanisme) sur l’intensité de la circulation piétonne et sur les motifs de refus précisés à l’article DG5 du RET.

L’Association Réseau Vivre Paris reste disponible pour assister les collectifs de riverains qui souhaiteraient contester des autorisations de terrasses ne respectant pas ces conditions (voir formulaire de contact).