ZENITH : quand la Justice passe à nouveau sur le Parc de La Villette…

Le 6 mars 2018 se tenait devant la 11ème chambre de la Cour d’appel de Paris, le procès du Zénith de Paris, implanté dans le Parc de La Villette et de son directeur Daniel Colling.

Celui-ci contestait la décision de mars 2017 prononcée par le tribunal de Police du 19ème arrondissement qui les condamnait à 81000 euros d’amendes contraventionnelles et à verser à une plaignante 31500 euros de dommages intérêts pour” avoir manqué à la règlementation sur la diffusion de musique amplifiée et avoir ainsi porté atteinte à la santé et à la tranquillité des riverains ” présents comme parties civiles.

Le directeur du Zénith, promoteur du “spectacle vivant,” avait choisi de faire le show dans la salle d’audience.

Il se présente en victime, injustement accusé de délits que d’autres ont commis:
« – M’sieur l’président, c’est pas moi qui fait du bruit, c’est mon voisin le Cabaret sauvage… ».
« – Je compatis aux souffrances du voisinage. J’aurais voulu y remédier en effectuant des travaux d’insonorisation mais j’en ai été constamment empêché parce que les ”murs” de la salle (une charpente métallique recouverte d’une enveloppe argentée de toile) appartiennent au Ministère de la Culture qui est resté sourd à mes demandes répétées ! »
« – Ma délégation de service public “m’oblige” à organiser environ 170 concerts par an, en majorité de groupes de rock, heavy metal, rap, qui viennent avec leur matériel de sonorisation, et ne respectent pas la règlementation. »
« Je n’ai aucune marge de manoeuvre sur l’émission de bruits diffusés à l’extérieur…».

Le président Eric Halphen interrompt ce lamento:
« – Mais alors, Monsieur, à QUOI servez-vous ? »

Un moment déstabilisé, D. Colling nous joue un autre sketch et enfile le costume d’un héroïque “lanceur d’alerte”…
D’une simple lettre envoyée au Conseil National du Bruit, il aurait obtenu que soient modifiées les dispositions sur les sons amplifiés: le nouveau décret paru au JO, c’est à lui qu’on le doit !

Une plaignante indignée lui fait remarquer qu’il se pare des plumes du paon et précise à la Cour que cet arrêté a nécessité des années de travaux et d’échanges au sein de groupes de travail réunissant tous les professionnels concernés et qu’on ne l’y a jamais vu.

La Commedia dell’arte se termine car les avocats abordent le procès sur le fond.

Ceux du Zénith réclament l’annulation de certaines contraventions pour “prescription”, annulation à laquelle s’oppose fermement l’avocate des riverains, arguments juridiques à l’appui.
Elle en profite pour rappeler
– que l’étude d’impact, pourtant obligatoire, n’a jamais été faite dans cet établissement ;
– que son contrat avec l’Etablissement Public du Parc de la Villette et de la Grande halle stipule “que le fermier déclare expressément assumer toute la responsabilité des éventuelles plaintes à l’encontre des nuisances provenant de ces activités” et
– que, par ailleurs, Monsieur Colling n’a pas déclaré ses comptes depuis ces dernières années, délit puni par la loi.

Enfin, la parole est donnée aux victimes.
Elles essaient de décrire leurs souffrances, les insomnies, la dépression, le délabrement progressif de leur santé ébranlée par ce bombardement de décibels et d’infra basses des heures durant : les répétitions de 14 à 18 heures puis le concert de 19h 30-20 h jusqu’à 23 heures.
Elles évoquent leurs efforts depuis treize ans, pour se faire entendre des directions successives du Parc, des pouvoirs publics (Ministères de la Culture, tutelle du Zénith, de la Santé, de l’Intérieur, du député, du sénateur, du maire, de la préfecture) en vain, à l’exception du Commissaire Rigon, en poste dans le 19ème, qui les a courageusement soutenues.
Elles tiennent donc la force publique pour coresponsable du scandale de santé que constituent les nuisances sonores du Zénith qui se poursuivent à ce jour.

Le 6 mars, le délibéré de la Cour d’appel se prononce : elle confirme le jugement de première instance: Daniel Colling et le Zénith de Paris sont CONDAMNES sur la base certains des procès-verbaux de constatation d’infractions ; mais elle déclare prescrites certaines contraventions mais.
La condamnation s’élève à 18 000 euros pour l’amende versée dans les caisses de l’Etat et des dommages intérêts sont dus à une plaignante.
Un attendu de la Cour d’appel est particulièrement clair et remarquable : ”la dimension économique n’a que peu de poids face à la règlementation en vigueur dont le but est la préservation de la santé des riverains lesquels ont droit au respect de leur vie privée”.

Satisfaits de cette décision sur le fond, les Riverains du Parc de la Villette considèrent néanmoins que le fait que l’arrêt admette la prescription de certaines infractions, sans tenir compte de l’ensemble des diligences de la police pour que leurs constatations produisent un effet juridique est un signal désastreux envoyé aux contrevenants.

Magali Bérenger

1 Comment

  1. Un Parisien solidaire

    Tout notre soutien aux riverains. Et bravo à celles et ceux qui ont obtenu cette décision sur le fond.

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