« Uritrottoirs » : une supercherie qui veut faire passer pour une innovation des comportements régressifs parfaitement cyniques

Jusqu’à présent uriner sur la voie publique a été considéré comme une contravention passible d’une amende d’un montant de 68€ selon le site territorial.fr.
Désormais c’est avec les encouragements des pouvoirs publics que les contrevenants pourront se soulager en public, si l’on en croit un article de Femme Actuelle.
Au nom d’une justification durable bobo-écolo – qui donne bonne conscience – on vient en effet de réinventer les toilettes sèches pour en proposer une version décomplexée : le pissoir à ciel ouvert pour hommes.
Afin de donner de la poésie à la chose ce pissoir est doté d’un bac à fleurs qui pourra d’ailleurs servir de dépotoir, de cendrier, d’essuie main et de vomitorium.
Chacune de ces commodités va coûter 3000€ au contribuable. Sans compter les frais de fonctionnement et de maintenance… une manne pour les sociétés bénéficiaires.

A la suite de Femme Actuelle, le Parisien s’émerveille de ces nouveaux gadgets proposés sous le nom propret mais impropre d' »uritrottoirs » (« trottoirs d’urinoirs ») et qu’il conviendrait d’appeler par leur vrai nom : « urinoirs de trottoir » ou plus simplement « pissoirs à ciel ouvert ».
Contrairement au Parisien nous ne portons pas un regard amusé sur un projet qui vise à reconnaître comme normal le fait d’uriner dans la rue et nous tenons à alerter sur un dispositif qui, sous couvert de résolution de problème et de pragmatisme ludique, nous amène dans les voies de la régression.

1/ Une discrimination qui constitue une violence symbolique faite aux femmes :
Nous nous étonnons du fait que, renonçant à toute éducation à la civilité, on entérine l’idée qu’un homme/un jeune doit pouvoir satisfaire ses besoins n’importe où et en imposer aux autres la vue.
Cela voudrait dire qu’un homme a des droits qui sont déniés à la femme et qu’en vertu de ces droits il peut imposer au regard des autres des actes qui relèvent de son intimité physiologique.
A quand des bacs à fleurs pour que les femmes puissent changer publiquement leurs serviettes hygiéniques dans les gares et dans la rue ?
Ce serait tellement commode, n’est-ce pas ?
En fait, le partage de l’intimité ne peut jamais être imposé…
– sans constituer une forme de violence : j’impose mon intimité à l’autre
– voire une forme de négation de l’autre : j’étale mon intimité comme si j’étais seul car je considère que l’autre n’existe pas.

2/ Une injure faite aux hommes :
Cet étalage de l’intime fait également injure aux hommes.
Beaucoup d’hommes ne souhaitent pas être contraints de voir leurs congénères s’exhiber dans une posture qu’ils jugent humiliante et dont ils pensent qu’elle donne de leur sexe une image dégradée.
Ils trouvent eux aussi que généraliser des pissoirs à ciel ouvert c’est considérer les hommes comme de « gros porcs » qu’on ne peut pas éduquer, ce qui fait injure aux personnes de sexe mâle.

3/ Une injure faite aux jeunes :
Nous vivons dans une société maternante qui « manque de Père » et où le mot « règles », « règlement « , « interdiction », « loi » sont perçus comme attentatoires à toute convivialité et liberté.
Les politiques ont peur des jeunes et ne savent plus quoi inventer pour se soustraire à leurs responsabilités dans le maintien d’un ordre public.
Ce faisant ils considèrent les jeunes comme incapables de survivre à toute limitation.
Or les jeunes humains ont droit à une éducation, laquelle passe par le biais du Lien (l’accompagnement, la concertation, la pédagogie) et par le biais de la Loi (l’interdiction, la responsabilisation, la répression).
Pas de Lien sans Loi et pas de Loi sans Lien.
Un éducation sans Lien est un dressage.
Une éducation sans Loi est un abandon.
Prétendre éduquer en faisant abstraction de l’un de ces deux piliers, c’est vouloir marcher sur une seule jambe.

4/ Revendiquer le droit de se soustraire aux règles c’est refuser l’idée-même de société :
L’homme n’est pas seulement un être naturel (biologique). Il est un être culturel : il vit en société.
Est culturel ce qui relève de la règle.
Comme le souligne Lévi-Strauss l’homme est, en effet, le seul être qui s’impose des règles, qui exige la règle pour la règle.
Le « bon sauvage » de Rousseau et « l’âme simple et naturelle de l’homme primitif » n’existent pas.
Prétendre se soustraire aux règles c’est refuser l’idée-même de société et se complaire dans une dangereuse utopie qui laisse croire que l’on peut vivre en société comme l’on vivrait en solitaire.
Si la vie en solitaire n’exige pas de règles, les règles sont une condition indispensable à la vie en société.

5/ « Lever la patte n’importe où » est un comportement « cynique » :
Bien avant Rousseau, le retour à la nature a été prôné par l’école cynique dont le principal représentant était le philosophe grec Diogène de Sinope (v. 413-327 av. J.-C.).
Celui-ci recommandait à ses disciples de se comporter « à la façon des chiens » qui font « toutes choses » (copuler, déféquer, uriner, se gratter, se lécher, etc…) en public sans se préoccuper de leur entourage.
« A la manière des chiens« , c’est ce que signifie le mot « cynique » puisque le mot « chien » se dit « kuôn, au génitif kunos » en grec ancien.
En effet, pour Diogène, la seule voie éthique permettant d’échapper au conformisme moral des cultures – jugées arbitraires et corruptrices – était de se conformer à la nature universelle en imitant… les chiens.
Lui-même donnait l’exemple de la transgression provocatrice : « il mangeait avec ses mains, urinait et aboyait comme un chien, se masturbait en public. »
Nous refusons l’alignement de nos pratiques sur un mode cynique régressif et dénonçons la supercherie qui tendrait à faire passer pour une innovation progressiste le fait de proposer aux hommes de faire leurs besoins en public, comme des animaux.

Nous demandons de véritables solutions.
A quand des toilettes dignes, ouvertes à toutes et à tous, fleuries ou pas, qui seraient couplées à tous les abris bus urbains ?
A quand une verbalisation effective et dissuasive qui responsabilise les contrevenants qui souillent et dégradent l’environnement et la propriété d’autrui ?

1 Comment

  1. Janine Weulersse

    Et quid de la peinture hydrofuge ? Nous cherchons un moyen de faire cesser l’utilisation de trois renfoncements de notre immeuble dont l’entrée de notre parking qui est largement en retrait comme pissotières et plus si besoin (fréquemment)!
    La Ville de Paris ne semble pas se soucier de notre réputation désastreuse de ville particulièrement sale. Venez à la Butte aux Cailles, vous serez édifiés en cheminant dans nos charmantes petites rues ……

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